La guerre des retraites à 64 ans


Avril 23 – Guerre des retraites

Voilà 3 mois qu’on nous rabat les oreilles avec ce sujet. Cinq remarques.

Il paraît que les Français sont majoritairement contre ! Quelle information ! Bien évidemment ils préfèrent tous partir à 62 ans plutôt qu’à 64 ans. On préfère aussi une boîte de bons chocolats plutôt que rien. Pourtant, quelle blague, on fait des sondages et on découvre que, majoritairement, les Français préfèrent partir tôt à la retraite. Ma conclusion est que toutes ces manifs, toute cette violence verbale, cette nouvelle haine n’ont aucun sens.

Et pourquoi négocier le non-négociable ? Puisqu’il s’agissait de faire passer une pilule, toute négociation laissait penser qu’elle était discutable alors qu’elle ne l’était pas, ou qu’elle pouvait donner lieu à des contreparties aussi généreuses ce qui était impossible. Il suffisait au contraire d’expliquer la nécessité de cette réforme douloureuse et de procéder par un simple vote au parlement pour passer de 62 à 65 ans et cela sans négociation. Tout le monde est capable de comprendre qu’une nécessité vitale a un coût, comme Churchill annonçant, dans un contexte bien pire, du sang, de la sueur et des larmes.

Trois, cette triste affaire serait liée à une petite affaire personnelle entre Laurent Berger et Emmanuel Macron. En d’autres circonstances, le leader de la CFDT avait fait preuve de plus de hauteur de vue quand il s’agit d’intérêts supérieurs comme la cohésion nationale.

Quatre, avec Macron, le gouvernement est au centre de l’échiquier politique où il occupe une large place après avoir débauché les meilleures têtes chez les socialistes et chez les républicains (qui ont du mal à s’en remettre), son opposition à gauche comme à droite s’en est trouvée réduite aux plus extrémistes. Ainsi, devant chaque projet gouvernemental, les médias habitués à faire entendre l’opposition, n’ont dans leurs micros que des gens pleins de haine et de revendications excessives. On voit le résultat, les débats sont réduits au plus bas niveau, on n’argumente plus, on invective, on bloque le pays. A vouloir rassembler l’intelligentsia politique du pays, on a abaissé le niveau des débats. Pire, on lui a coupé le bec (les médias ne la consultent plus et le gouvernement non plus).

Cinq, le mal induit est profond, on parle même de tout casser. Évoquant les sondages négatifs de nos précédents présidents, le journaliste Yves Thréard explique que les Français sont régicides et veulent des changements de régime, etc. Mais pour moi, ce n’est pas la constitution qui est mauvaise, c’est la manière dont elle est mise en œuvre par nos présidents successifs qui ont dirigé leurs gouvernements au lieu de laisser ce soin au Premier ministre. L’esprit de notre constitution est qu’en politique intérieure le Président fixe les grands objectifs tandis que le Premier ministre dirige le gouvernement en vue de les atteindre. Intervenant dans tous les détails, nos Présidents ont été beaucoup trop dominants et ont reçu logiquement tous les coups de foudre du peuple qui aujourd’hui veut « tuer » leur roi. Celui-ci l’aura mérité faute d’avoir choisi de fortes personnalités comme Premier ministre et de s’être mis en retrait de la politique intérieure. Comment faire maintenant ? Peut-être, mais c’est à étudier, donner au Conseil constitutionnel le droit de tacler le Président chaque fois qu’il descend trop dans l’arène intérieure. Revenir à une constitution un peu moins présidentielle pour les affaires intérieures, comme avant sa révision en l’an 2000. Mais dans l’immédiat, demander à ce Président de parler moins, beaucoup moins. Et d’écouter plus, beaucoup plus.